Issy-les-Moulineaux, dans les nouveaux locaux de Microsoft.
Une réunion du French SCRUM User Group
Le French SCRUM User Group organisait hier soir une conférence avec Ken Schwaber.C'est donc Luc Legardeur, fondateur du SUG français, qui a débuté la séance en remerciant Microsoft et le co-créateur de Scrum, Ken Schawber d'être passé. Il a annoncé que Ken va présenter son nouveau site Scrum.org et répondra aux questions de l'assistance, le tout suivi d'un cocktail. Le programme du prochain trimestre du Scrum User Group a été annoncé:- Rencontre avec Scott Ambler mi-mars. Il est lead architect chez IBM. IBM est devenu il y a peu sponsor du SUG.
- Soirée anniversaire le 30 mars chez Microsoft à nouveau.
La vision Microsoft sur l'agilité
C'est ensuite Xavier Warzee de Microsoft France qui a pris la parole pour tout d'abord nous rassurer : Microsoft ne fait pas une OPA sur le SUG, c'est simplement l'opportunité du passage de Ken à l'occasion d'une formation en France. Xavier a poursuivi sur un ton franc : pourquoi aujourd'hui Microsoft s'intéresse à l'agilité ? La société essaye de structurer et faciliter les efforts dans le monde de l'agilité. Ils commencent a avoir une offre qui se formalise un peu plus au travers de leur outil Visual Studio Team Foundation Server qui supportera directement SCRUM. Mais il s'agit pour Microsoft d'être pertinent et d'apporter de vraies solutions et, d'après Xavier, pas simplement de “préserver leur chiffre d'affaires”. Il annonce travailler de façon très proche avec Agile France et Laurent Bossavit qui était présent ce soir. Cela explique que Microsoft soit sponsor de plusieurs conférences agiles. Xavier revendique aussi des partenaires et un labo qui essayent de fournir des solutions, des sessions, des ateliers qui permettent d'adopter les technologies soutenant l'agilité. Microsoft, Scrum.org et différentes sociétés de formation se sont donc associées. Selon Xavier, le piège de SCRUM est de penser que les pratiques se suffisent à elles-mêmes quelque soit le cas de figure, le projet. Or, il convient de ne pas ignorer tout l'acquis en ingénierie logiciel, en pratiques de test et d'intégration continue. L'idée est de rechercher avec les outils Microsoft les meilleures pratiques et technologies soutenant SCRUM. Par exemple, vu la taille des itérations dans un projet SCRUM, le temps ne peut pas être perdu en construction du logiciel ou en tests.Présentation de scrum.org par Ken Schwaber
Xavier a ensuite passé la parole à l'invité du soir : Ken Schawber.Après un “bonjour, comment allez-vous ?“, nous avons épuisé tous les mots de vocabulaire francophone de Ken. Il introduit son discours : s'il y a quelque chose que vous n'aimez pas dans SCRUM, c'est à lui que vous devez vous adresser car il en est à l'origine ! Il sort d'une formation de deux jours pour Microsoft dans laquelle il a formé des personnes en profondeur à SCRUM. En outre, il s'est excusé de sa tenue vestimentaire. En s'habillant avec un maillot des “All Backs” ce soir, il ignorait que la France avait une équipe nationale qui pouvait rivaliser avec les blacks ! De toute façon, les néo-zélandais lui ont déjà dit que, visiblement, il ne connaissait rien au rugby !Ensuite, il a présenté Scrum.org. Moins ambitieux que la ScrumAlliance, c'est une organisation dont le but n'est pas de transformer entièrement la façon dont les entreprises travaillent mais “seulement” d'améliorer notre monde du développement logiciel professionnel.A l'origine, ce qui a plu à Ken dans le développement logiciel partait d'une proposition simple : “voilà une machine vierge, faites comme vous voulez, mais faites que ça marche !“. Mais depuis, selon lui, nous nous sommes perdus en chemin : nous avons introduit le cycle de développement en cascade et nous nous sommes laissés séduire par le style de management “Command & Control”. SCRUM est donc là selon lui pour redonner l'envie aux développeurs de se lever chaque matin pour aller satisfaire des utilisateurs auxquels ils ont manqué tellement ils adorent les merveilleux logiciels qu'ils produisent ! SCRUM devrait contribuer à rendre la profession relativement plus envieuse.
Un guide, des certifications en-ligne et des formations
Scrum.org s'inscrit dans cette volonté. Ce site propose le guide définitif de ce qu'est SCRUM. Ce guide de 16 pages montre que SCRUM est un framework simple. Il garantit l'intégrité de la définition de SCRUM par ses pères après qu'on ait tant cherché à la mélanger à d'autres méthodes (Kanban, Lean, SixSigma, etc. - ce que Ken ne déplore pas).Scrum.org s'associe donc à des organismes partenaires afin de mettre en œuvre des formations SCRUM et des certifications. Ken nous assure qu'on peut échouer le passage de cette certification, ce n'est pas qu'une simple formalité ! Il existe aussi un questionnaire en ligne (gratuit jusqu'à mi-2010) pour s'auto-évaluer mais qui permet aussi au staff de Scrum.org d'obtenir du feedback sur SCRUM lui-même. Il donne alors quelques exemples de questions qui lui donnent l'occasion de créer un vote dans l'assemblée et de vous transmettre la première citation mémorable de la soirée :“Being in the majority does not always mean you are right, as the waterfall as proven.“Concernant l'adoption de SCRUM, il pense que de nombreuses sociétés tendent à trop préparer les contextes des projets SCRUM. Ken leur conseillerai plutôt de se lancer plus vite. Les rétrospectives sont là pour commencer à s'améliorer dès le début ! Ken explique que le succès de SCRUM vient surtout de l'envie de sortir de la médiocrité du cycle en cascade. Mais, contrairement à ce qu'on pourrait penser et conformément à sa longue expérience, la force du changement qui pourrait être générée par les échecs répétés du cycle en cascade n'est presque jamais une suffisante pour arriver à mieux faire en adoptant SCRUM, ceci étant vérifié dans l'attitude des managers comme des ingénieurs. Il a souvent constaté que cette habitude de médiocrité dans les organisations à tendance à augmenter l'effet “ScrumBut” (le mot est malicieux) : “Nous faisons du SCRUM, MAIS pas … <n'importe quelle pratique qui les dérange, rend leur médiocrité visible, atteste de leur non efficience, etc.>…“. Après ce passage plutôt sombre dans son discours, une proposition constructive nous attend.Pour améliorer cette situation, il est donc en train de monter des formations complètes pour des équipes entières dans lesquelles on choisit une pile technologique (open source java, Microsoft VisualStudio par exemple) et on est formé à SCRUM, aux techniques d'ingénierie agiles et aux outils ! Ce sont des formations qui sont donc plus complètes mais aussi plus exigeantes.
“Être dans la majorité n'implique pas forcément avoir raison, le cycle de développement en cascade peut en attester.“
Les questions de l'assistance
C'est sur cette annonce que sa présentation s'arrête pour faire place aux questions de l'assistance.- Traduction des cours SCRUM ?
“Work-in-progress” ! - SCRUM dans de grand projets ?
SCRUM est très adapté aux petites équipes. Il y a des livres qui traitent de ce sujet, en particulier le sien: “The Enterprise and Scrum”, Microsoft Press - 2007. Et hop, nouvelle citation à retenir :“And, just in case you are tempted, waterfall is NOT an alternative [to scale agile for large teams].“
“Et, juste au cas où vous seriez tenté, le cycle en cascade n'est PAS une alternative [au déploiement de l'agilité à des équipes plus grandes].“ - Critique : Les certifications sont individuelles alors que SCRUM fait l'apologie du travail en équipe.
Dans le cours qu'il est en train de monter, la note finale se décompose en un score donné par les coéquipiers de formation et un score individuel.
C'est bien évidemment une formation plus dure à monter que la certification SCRUM classique car elle nécessite des formateurs compétents sur la méthode et la technique. - Votre expérience relevant le plus grand défi en SCRUM ?
DoubleClick. Le logiciel n'était pas bon du tout, peu de connaissance partagée. Une implication trop forte des managers dans l'allocation des tâches. Le défi était donc d'intégrer des nouveautés en parallèle sur le logiciel. La meilleure nouvelle pour eux fut de se faire racheter par Google et ne plus jamais entendre parler de développement logiciel, ils avaient sortit “notre” Champagne pour fêter ça… - Remarque : SCRUM apporte essentiellement un isolement pour l'équipe de développement pour commencer à faire les choses bien.
- Remarque : Le rythme de livraison dans SCRUM peut être comparé à la régulation de la température dans une pièce. Il ne sert à rien de ré-évaluer la température trop souvent pour ajuster les radiateurs. Mais il n'est pas non plus efficace de ne le faire qu'une fois dans la journée car la température a peu de chances d'être constante au cours de la journée.
- SCRUM ne s'applique-t-il que pour les technologies objet moderne ?SCRUM peut même nous aider dans notre vie quotidienne : pour nourrir un enfant par exemple. Votre enfant est votre client. Vous tentez de lui faire avaler son repas, il refuse toujours d'avaler une seule cuillère sous la contrainte. Le lendemain, retentez l'expérience en lui demandant combien de cuillères il veut manger ce soir ? Troublé par la question, il répondra “une”, vous lui donnez alors une cuillère et il vous répondra de lui-même, “j'en voudrais deux maintenant” parce que c'est lui qui l'aura choisi.
- Vivre dans une organisation avec un cycle en cascade ?
Ken raconte comment on peut commencer à faire du SCRUM sans jamais prononcer le mot. La méthode ne propose rien d'autre que de se mettre tous ensemble, construire quelque-chose, tout en y trouvant du plaisir. - Gérer une équipe infrastructure avec SCRUM ?
Rendre visibles les problèmes de ce type (délais trop long pour commander un serveur, ouvrir un port, avoir accès à des métriques) constitue déjà une partie de la solution. - SCRUM + CMMI, vous adhérez ?
SCRUM vous mène directement à un niveau CMMI niveau 3, il adhère ! - A propos de l'applicabilité de SCRUM à d'autres domaines que le développement logiciel ?Ken voit bien SCRUM s'inscrire dans un mouvement sociétal plus global. Il défend une vision d'une société post industrielle mature dans laquelle le management doit s'adapter en passant du paradigme “Command & Control” vers une façon différente diriger des équipes : le “servant leadership” c'est-à-dire une position beaucoup plus humble du manager qui se met au service de ses collègues en tant que facilitateur. Parce que c'est simplement le moyen le plus sain et le moins stressant pour tous de mener des équipes à accomplir les objectifs dans des projets de plus en plus complexes. Mais cela représente évidemment une révolution culturelle à accomplir. En outre, cela court circuite le pouvoir, l'autorité ou le prestige et réclame de la transparence pour que les collègues se fassent confiance.
- <em title=“J'aime bien les questions de Laurent Bossavit !“>Quel est le secret de Ken pour restaurer la passion ?
Vendre un produit peut aider. Le succès est toujours très vendeur. Par exemple, on peut rétrospectivement analyser pourquoi Toyota rencontre un succès plus important relativement à la faillite des sociétés américaines de production automobile.